Les jours

En novembre, un nouvel incendie a ravagé l’usine des vêtements de l’ouest.

Les neuf étages de l’enfer se sont écrasés sur les ouvriers du pays des terres inondées.

Tu as pris mes os froids entre tes mains, la ruelle était maintenant déserte,

les fumeurs déplacés dans des caves invisibles.

Je pleurais sur des morts inconnus,

j’errais dans de grands centres commerciaux,

surprise par le nombre, surprise,

il n’y avait pas d’automne.

Décembre a commencé la peau tirée sur les paupières,

tirée comme vers hier,

hier sans passé,

des infanticides en série,

des marchandises emballées sous l’arbre à images.

Oublions ce qui s’est passé, oublions que le tueur avait

ciblé des enfants, disiez-vous.

Nous attendions la fin de l’égarement, c’était la démocratie rêvée,

le blanc paysage sous une toiture illuminée.

La vision noire faisait toujours de moi l’ennemi de la poésie, tu réchauffais

mes petits os, le chat transpirait, je ne disais mot, nous étions des multiples,

des nombres carrés de l’amour, mes sœurs, mon frère, mes enfants.

Mes histoires d’animaux muets.

Bibliographical info

Élise Turcotte, « Les jours », La forme du jour, Éditions du Noroît, 2016.

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